Une longue étape en prévision

Ma première nuit sous tente ne fut pas si mauvaise malgré l’impossibilité de fermer l’œil plus de deux heures consécutives faute sans doute au confort spartiate auquel je devrai m’habituer : une amplitude de mouvements limitée dans mon sac de couchage sarcophage et une faible largeur de mon matelas gonflable m’obligent à être le plus statique possible. Cette nuit, je me suis levé vers minuit afin de regarder en direction du ciel pour espérer voir des aurores boréales, qui finalement n’étaient pas au rendez-vous.

A 7h30 je finis mon paquetage et pars à l’assaut des 18/20 kilomètres qui me séparent d’Alesjaure, l’étape de ce soir. Cette journée s’annonce comme l’une des plus longues du périple mais sans difficulté liée au terrain. Quelques randonneurs sont déjà sur la route alors que d’autres flânent, je découvre plusieurs tentes encore occupées ici et là, au début de mon étape.

Le trek du Kungsleden est assez fréquenté, même en ces deux dernières semaines de praticabilité. Au-delà du 20 septembre (cette année) les refuges seront fermés et la météo commencera à habiller la Laponie de son fameux drap blanc pendant tout l’hiver. Je fais connaissance avec un Américain que je croise à plusieurs reprises et avec qui je ferai une partie du chemin. La plupart des randonneurs sont Allemands, Suédois ou Suisses.

En début de matinée, les paysages sont dans la continuité de ceux de la veille, des petits arbustes forment un sous-bois. Le chemin du Kungsleden ne présente pas de difficultés particulières et cette randonnée est loin d’être aussi physique que celle de mon trek au Népal l’année dernière.

Les montagnes se dévoilent

Peu à peu, les montagnes aux sommets enneigés se rapprochent de mon champs de vision. Les arbustes se font moins nombreux, la vallée se dévoile. Les paysages de la Laponie tels que je me les imaginais se révèlent. La vallée devient ensuite plus large et offre un terrain propice à la présence de rennes, que je croise pour la première fois. La climat rude de la région rend la vie animale assez rare. Les rennes en sont les principaux occupants. Des élans vivent également dans cette région. Plus généralement, la Laponie est peuplée de loups, lynx, ours, renards et lièvres arctiques, à priori absents du Kungsleden.

De nombreux lacs se forment à partir de la neige fondue qui dévale les montagnes en cours d’eau et forme la rivière principale. Certains de ces lacs offrent une couleur turquoise du plus bel effet. Les paysages deviennent alors magnifiques. La verdure estivale des collines répond au blanc immaculé des montagnes opposées. Entre les deux, la vallée et les rennes profitent des herbes abondantes avant que l’hiver n’approche. Mes yeux se régalent. La Voie Royale suédoise est un chemin bien entretenu, certains passages sont facilités par des poutres en bois rendant la randonnée possible sur les terrains marécageux formés par la fonte des neiges. Après une courte halte en compagnie de l’Américain, je poursuis ma route avec quelques muscles qui commencent à se plaindre. La réaction physique normale au second jour d’un trek.

Campement près du refuge d’Alesjaure

De l’autre côté du lac j’aperçois enfin le refuge d’Alesjaure, constitué de plusieurs bâtiments pour les dortoirs. C’est après 6h30 de marche que je me réchauffe avec un café et des fruits secs, à l’abri du vent qui m’aura accompagné tout au long de la journée. Je profite de la petite boutique du refuge pour me ravitailler en vivres pour les prochains jours. Je ne fais qu’un court passage dans le refuge, préférant planter ma tente à 100 mètres de là, sur une petite plaine ouverte au vent mais offrant une vue magnifique sur le lac et les montagnes qui l’entourent. Une situation sublime que le vent violent, qui fait trembler la toile de ma tente, m’empêche de savourer à sa juste valeur.

Après une lessive et un nettoyage corporel limité à l’essentiel à cause de la fraicheur extrême de l’eau et du vent amplifiant cet effet, je me pose dans ma tente le temps d’écrire ces quelques lignes avant de profiter d’une nouvelle soirée au plus proche de la nature suédoise.

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